Des menaces sur la réserve stratégique en électricité pour l’hiver prochain
L’Echo – 06/07/2017 – Christine Scharff
Le problème? La Belgique s’apprête à notifier à l’Europe le mécanisme de réserve stratégique. Du coup, elle risque de ne pas pouvoir signer à temps les contrats pour la réserve de l’hiver prochain.
Certains, dans les milieux gouvernementaux, ne cachent pas leur inquiétude. « Le risque, c’est que nous n’ayons pas de réserve stratégique pour couvrir une pénurie d’électricité cet hiver. C’est une bombe », entend-on.
La cause de ces craintes? La ministre de l’Énergie Marie-Christine Marghem (MR) s’apprête, une fois qu’elle aura obtenu l’aval du gouvernement, à notifier à l’Europe le mécanisme de soutien que constitue la réserve stratégique. Un mécanisme qui a été mis en place par son prédécesseur, Melchior Wathelet (cdH), mais qui n’avait jamais reçu l’aval des autorités de la concurrence européennes.
Or, la Commission européenne insiste pour que ce mécanisme lui soit officiellement notifié, car il pourrait être considéré comme une aide d’État illégale. Des centrales au gaz qui ont décidé de fermer faute de rentabilité reçoivent en effet une rémunération pour rester en stand-by, prêtes à redémarrer en cas de pénurie d’électricité. Le cabinet Marghem se montre toutefois confiant dans sa capacité à démontrer le contraire à l’Europe.
Une obligation de standstill
Le problème, c’est que tant que la procédure est en cours, l’obligation de ‘standstill’ veut qu’aucun acte qui pourrait constituer une infraction ne soit posé, est-il apparu lors d’une discussion au gouvernement. Ce qui empêche, en théorie, l’État belge de signer les contrats pour constituer la réserve stratégique pour l’hiver prochain. De quoi susciter la nervosité.
Le gestionnaire de réseau Elia a estimé fin de l’an dernier que la Belgique pourrait avoir besoin d’une réserve stratégique de 900 MW pour l’hiver prochain, 150 MW de plus que pour l’hiver 2016-2017 – une décision prise en tenant compte d’une indisponibilité possible d’une part importante du parc nucléaire français, et de celle d’un réacteur nucléaire belge de 1.000 MW durant tout l’hiver.
Un nouvel appel d’offres a été lancé en début d’année pour constituer cette nouvelle réserve de 900 MW pour les trois hivers à venir. Les offres, qu’elles émanent des centrales au gaz qui ont décidé de fermer ou d’acteurs prêts à effacer leur consommation aux moments critiques, devaient être rentrées pour le 18 avril. Et les contrats doivent être signés pour le 31 octobre au plus tard, afin que la réserve soit opérationnelle le 1er novembre. Or, peu s’attendent à ce que la Commission européenne statue avant la fin de l’année.
Au sein du gouvernement, on examine dès lors comment constituer cette réserve pour l’hiver à venir, malgré ce principe du standstill. « Nous allons attendre autant que possible, une fois ce dossier notifié à l’Europe. Mais nous ne pouvons pas mettre en danger le système électrique belge et celui de nos voisins, réagit la ministre Marghem. Le cas échéant, nous verrons ce que nous pouvons prévoir avec la Commission européenne. »
Parmi les arguments juridiques que le gouvernement pourrait évoquer, il y a le fait que le système est en place depuis plusieurs années, et donc que si infraction il devait y avoir, elle a déjà eu lieu. Autre argument: les règles européennes imposent aux États membres de coopérer entre eux pour que le Marché unique fonctionne, or en cas de pénurie d’électricité, l’absence de réserve stratégique en Belgique pourrait également mettre en péril le système électrique des pays voisins. Autre piste de réflexion: introduire dans les contrats une clause suspensive, en cas d’absence de feu vert de l’Europe.
EDF Luminus gagne un procès contre l’Etat belge… tandis que deux de ses sites se mettent en grève
Le Soir – 06/07/2017
EDF Luminus a gagné un procès contre l’Etat belge. L’affaire concernait une taxe que le producteur énergétique devait payer sur le gaz utilisé pour faire tourner les centrales électriques. L’Etat devra rembourser une partie de cette contribution mais a décidé de faire appel, rapportait mardi soir la VRT. L’information a été confirmée par la ministre de l’Energie Marie-Christine Marghem (MR). Engie Electrabel et Eon ont également des affaires en cours, les producteurs énergétiques se retranchant derrière la réglementation européenne qui interdit de lever des taxes sur l’énergie utilisée pour produire une énergie alternative. Cette réglementation date de 2004 mais ce n’est qu’en 2014 que la Belgique a supprimé cet impôt. Le cabinet Marghem a confirmé que l’Etat ferait appel de la décision.
Deux sites d’EDF Luminus étaient à l’arrêt ce mardi. Suite au licenciement collectif de 14 personnes la semaine dernière, le syndicat chrétien CNE a indiqué avoir mis en place un plan d’action. La centrale de Seraing et l’îlot Saint-Michel étaient donc en grève. La CNE dénonce l’absence de « concertation préalable avec les représentants des travailleurs. Par son acte délibéré, EDF Luminus a entraîné le gel des négociations sectorielles. Pour la CNE, il n’y a plus d’obligation pour les travailleurs à respecter ces mêmes règles. »
Didier NICAISE Secrétaire Fédéral GAZELCO